Assurance-vie / succession : application à compter du 01/01/2016 de la réponse CIOT
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Comment bien choisir son contrat d'assurance-vie ?
La réponse ministérielle CIOT du 23 février 2016 modifie le traitement fiscal applicable aux droits de succession des contrats d’assurance-vie souscrits par un époux marié sous le régime de la communauté et alimentés par des deniers communs.
Ces dispositions sont applicables aux successions ouvertes à compter du 1er janvier 2016.
- Traitement fiscal applicable aux successions ouvertes avant le 1er janvier 2016
En 2010, désireux d’aligner les règles fiscales et les règles civiles applicables aux contrats d’assurance-vie, le gouvernement a publié une réponse ministérielle dite « réponse BACQUET » (http://bofip.impots.gouv.fr/bofip/3456-PGP/version/26?identifiant=BOI-ENR-DMTG-10-10-20-20-20121220).
Cette réponse ministérielle a modifié la doctrine fiscale relative aux droits de succession applicables aux contrats d’assurance-vie souscrits dans un couple marié sous le régime de la communauté, par un des deux conjoints, mais alimentés par des deniers communs.
Conformément aux règles civiles en la matière, une telle succession conduisait, en cas de décès du premier époux et survie du conjoint ayant souscrit le contrat, à faire naître une récompense due par le conjoint survivant au bénéfice de la communauté.
Dans la pratique, en la présence d’enfants communs, cela conduisait à faire acquitter à ces héritiers des droits de succession dès le premier décès, sans pour autant pouvoir bénéficier du contrat, dès lors que ce dernier n’était pas dénoué. Les mêmes capitaux étaient donc imposés deux fois aux mains des héritiers, la première fois lors du décès du conjoint bénéficiaire et ensuite lors du partage de la succession du conjoint-souscripteur.
Quels principaux avantages et inconvénients d’une telle doctrine ?
Avantages de la réponse BACQUET | Inconvénients de la réponse BACQUET |
---|---|
Conformité avec le droit civil Principe fondant cette position : le contrat d’assurance-vie dont est titulaire le conjoint survivant a, pourtant, été alimenté par des deniers communs, appartenant donc, en principe, pour moitié, au conjoint décédé. Une récompense est naturellement due par le conjoint survivant à la communauté, ceci faisant naitre, pour les héritiers, une créance au décès du premier de leur parent. | Contraindre les héritiers au paiement immédiat de droits sur un bien dont ils ne sont pas nécessairement bénéficiaires En effet, il ne peut être exclu que le contrat souscrit par le conjoint survivant l’ait été au bénéfice d’un tiers ou d’une association, voire que le conjoint survivant ne dépense une partie ou la totalité des capitaux, contenus dans le contrat, de son vivant. |
- Traitement fiscal applicable aux successions ouvertes à partir du 1er janvier 2016
La réponse ministérielle CIOT est particulièrement favorable aux héritiers. Elle rapporte la réponse BACQUET et modifie les règles applicables aux droits de succession des contrats d’assurance-vie.
Lorsqu’un époux, marié sous le régime de communauté légale, souscrit un contrat d’assurance-vie avec les fonds communs, ce contrat est considéré comme étant un bien commun. Si l’époux bénéficiaire décède le premier, le contrat d’assurance-vie n’est pas dénoué : par conséquent, sa valeur de rachat (1) entre dans l’actif successoral de la communauté, mais n’est pas soumise au paiement des droits de succession. La moitié de la valeur du contrat d’assurance-vie du conjoint survivant est attribuée en usufruit au profit du conjoint survivant et en nue-propriété au profit des enfants.
Désormais, les capitaux engendrés par un tel contrat ne seront plus imposés deux fois. C’est au décès de l’époux-souscripteur que les héritiers devront s’acquitter des droits de succession.
Exemples concrets :
Dans les deux cas étudiés, nous serons en présence d’un couple marié sous le régime de la communauté avec 2 enfants communs et d’un contrat d’assurance-vie souscrit par l’époux A et alimenté au moyen de deniers communs.
Cas n° 1
Actif de communauté au décès de l’époux B :
- 100 000 € de biens immobiliers et mobiliers (dont financiers) divers
- 300.000 € sur le contrat d’assurance vie de A
Soit un actif de communauté de 400.000 €
Âge du conjoint survivant : 66 ans
Application réponse BACQUET | Application réponse CIOT | |
---|---|---|
Actif de communauté | 400.000 € | |
Masse taxable au premier décès | 200.000 €* | 50.000 €** |
Usufruit du conjoint exonéré*** | 80.000 € | 20.000 € |
Nue-propriété des deux enfants | 120.000 € | 30.000 € |
Nue-propriété pour chaque enfant | 60.000 € | 15.000 € |
Droits de succession pour chaque enfant**** | 0 € | 0 € |
(1) La valeur de rachat correspond à la valeur du contrat, qui est calculée en fonction des capitaux versés et des intérêts engendrés diminués de diverses charges afférentes au contrat (prélèvements sociaux, frais de gestion).
* Soit ½ de l’actif de communauté
** Soit ½ des seuls biens autres que le contrat d’assurance-vie
*** fonction de l’âge du conjoint survivant – 66 ans : 40 %
**** après abattement en ligne directe de 100 000 €
Autrement dit, quelle que soit la réponse ministérielle applicable, dans un tel cas, aucune incidence lors du premier décès, dès lors que l’abattement applicable en ligne directe dispense les enfants du paiement de droits.
Cas n° 2
Actif de communauté au décès de l’époux B :
- 600.000 € de biens immobiliers et mobiliers (dont financiers) divers
- 300.000 € sur le contrat d’assurance vie de A
Soit un actif de communauté de 900.000 €
Age du conjoint survivant : 78 ans
Application réponse BACQUET | Application réponse CIOT | |
---|---|---|
Actif de communauté | 900.000 € | |
Masse taxable au premier décès | 450.000 €* | 300.000 €** |
Usufruit du conjoint exonéré*** | 135.000 € | 90.000 € |
Nue-propriété des deux enfants | 315.000 € | 210.000 € |
Nue-propriété pour chaque enfant | 157.500 € | 105.000 € |
Droits de succession pour chaque enfant**** | 9.694 € | 250 € |
* Soit ½ de l’actif de communauté
** Soit ½ des seuls biens autres que le contrat d’assurance-vie
*** fonction de l’âge du conjoint survivant – 78 ans : 30%
**** après abattement en ligne directe de 100.000 €
Au décès de l’époux A :
Application réponse BACQUET | Application réponse CIOT | |
---|---|---|
Masse successorale au second décès | 300.000 €***** | 300.000 €***** |
Créance issue de BACQUET | 150.000 €******* | / |
Masse taxable au second décès pour les deux enfants | 150.000 € | 300.000 € |
Masse taxable au second décès pour chacun des enfants | 75.000 € | 150.000 € |
Droits de succession pour chaque enfant | 13.194 € | 28.194 € |
*****le contrat d’assurance-vie supportera sa propre fiscalité, il ne reste donc plus que la seconde moitié du patrimoine autre que le contrat (600 000/2=300 000 €)
****** les enfants ont acquitté des droits pour être nus-propriétaires de 450 000 €. Or ils n’ont réellement bénéficié que de la moitié du patrimoine hors assurance-vie soit 600 000/2 = 300 000 €, ils ont donc une créance de 450.000-300.000 = 150 000 €
Application réponse BACQUET | Application réponse CIOT | |
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Somme des droits de succession pour chaque enfant | 22.888 € | 28.444 € |
Dans ce cas, contrairement aux idées reçues, l’application de la réponse BACQUET permettait une économie en termes de droits de succession.
Bilan
Les effets concrets de la remise en question de la réponse BACQUET seront variables, essentiellement en fonction de :
- 1 – La composition de l’actif successoral
- 2 – La valeur de l’actif successoral
- 3 – L’âge du conjoint survivant au moment du décès
Notre conseil
Afin de contourner les effets de la réponse BACQUET, certains contribuables mariés sous le régime de la communauté ont eu recours à la co-souscription de contrats d’assurance-vie avec clause démembrée.
Malgré la disparition de ces dispositions, nous attirons votre attention sur les avantages, qui demeurent, à souscrire sous une telle forme !
La co-souscription, notamment, permet, peu importe l’ordre des décès, de protéger le conjoint survivant et de préparer la transmission.
En cas de dénouement au 1er décès, le conjoint survivant se trouve en possession du capital-décès. Ce capital constitue alors un bien propre. En sus, dans l’hypothèse où il aurait été désigné bénéficiaire, il ne devra aucune récompense à la communauté.
En cas de dénouement du contrat au 2nd décès, le conjoint survivant, à l’occasion du premier décès, se retrouve titulaire du contrat d’assurance qui comporte l’intégralité des sommes capitalisées. Il ne doit aucune récompense à la communauté et bénéficie de son antériorité fiscale s’il doit effectuer des rachats. Les enfants pourront être désignés comme bénéficiaires du contrat et profiter d’une fiscalité avantageuse.
Une clause démembrée vous permettra, en outre, de faire bénéficier les capitaux décès à deux générations successives.