Quitter la France
Le
Expatriation : Approche civile et fiscale
L’année du transfert de son domicile fiscal à l’étranger, l’expatrié est tenu à certaines obligations déclaratives ; désormais accentuées par le mécanisme de l’Exit tax pour tous les départs survenus à compter du 3 mars 2011.
Les obligations déclaratives au regard de l’impôt sur le revenu
- L’année de son départ, l’expatrié doit signaler son changement de situation fiscale et communiquer sa nouvelle adresse au centre des impôts dont il dépendait avant son départ.
- L’expatrié doit préciser sa date de départ à l’étranger dans sa déclaration d’impôt sur le revenu dans le cadre réservé à cet effet, intitulé « Autres renseignements ».
- L’année du transfert, il devra remplir :
- un imprimé n°2042 comprenant l’ensemble de ses revenus perçus du 1er janvier à la date de son départ.
Si au cours de cette période, le contribuable a reçu des revenus de source étrangère, il doit les déclarer sur un imprimé n°2047 et les reporter sur l’imprimé n°2042 - un imprimé n°2042-NR comprenant les seuls revenus de source française, imposables en France, qu’il aurait perçus depuis la date de son départ jusqu’au 31 décembre
- un imprimé n°2042 comprenant l’ensemble de ses revenus perçus du 1er janvier à la date de son départ.
Les obligations déclaratives au regard des impôts locaux
Le domicile fiscal est indifférent, le critère déterminant est celui du lieu de situation des immeubles ; ainsi l’expatrié demeure redevable des impôts locaux, même s’il transfère son domicile fiscal à l’étranger, dès lors qu’il est propriétaire d’immeubles situés en France.
Les obligations déclaratives au regard de l’impôt sur la fortune immobilière
L’Impôt sur la Fortune Immobilière est dû dès lors que vous détenez, avec les membres de votre foyer fiscal, un patrimoine immobilier supérieur à 1 300 000 €.
Cette valeur est appréciée chaque année au 1er janvier.
Si vous avez le statut de non-résident fiscal français au 1er janvier, vous serez généralement soumis à l’IFI que sur la part des biens détenue en France.
Nous vous conseillons toutefois de vous reporter à la convention fiscale visant à limiter la double imposition, si une telle convention a été signée entre la France et votre nouvel état de résidence.
Les implications du transfert du domicile fiscal hors de France au regard de l’exit tax
Applicable aux transferts du domicile fiscal hors de France survenus à compter du 3 mars 2011, l’exit tax consiste dans une imposition immédiate de certaines plus-values latentes, des créances trouvant leur origine dans une clause de complément de prix (ou “clause d’earn out”) et des plus-values en report d’imposition.
Le contribuable peut néanmoins bénéficier d’un sursis de paiement et un dégrèvement de l’impôt ; qui aurait été immédiatement acquitté lors du transfert ; est prévu dans certaines conditions.
Champ d’application de l’Exit tax
Les contribuables sont imposables sur les plus-values latentes constatées sur les droits sociaux, valeurs, titres ou droits détenus directement ou indirectement par les membres du foyer fiscal à la date du transfert, lorsque deux conditions cumulatives sont remplies :
- les contribuables ont été fiscalement domiciliés en France, même de manière discontinue, pendant au moins six des dix années précédant le transfert du domicile fiscal à l’étranger,
- ces droits sociaux, valeurs, titres ou droits leur confèrent au moins 50 % dans les bénéfices d’une société, OU dont la valeur cumulée excède 800 000 euros
Rappel : Ces seuils s’appliquent aux départs survenus à compter du 1er janvier 2014 ; pour les départs antérieurs, il s’agit des droits et titres conférant au moins 1% dans les bénéfices d’une société OU dont la valeur cumulée excède 1 300 000 euros.
- Sont également imposables au titre des créances représentatives d’un complément de prix ; les contribuables qui ont été domiciliés en France, même de manière discontinue, pendant au moins six des dix années précédant le transfert du domicile fiscal à l’étranger
- En revanche, l’ensemble des contribuables transférant leur domicile fiscal hors de France sont assujettis à une éventuelle imposition de leurs plus-values en report d’imposition, lors de ce transfert, quelle que soit la durée de résidence en France
Assiette imposable
Les plus-values latentes sur valeurs mobilières sont déterminées par la différence entre :
- la valeur des titres ou droits lors du transfert du domicile,
- leur prix d’acquisition par le contribuable (ou en cas d’acquisition à titre gratuit, leur valeur retenue pour la détermination des droits de mutation)
Avant leur assujettissement à l’exit tax, les plus-values latentes sont réduites de l’abattement pour durée de détention (général ou dérogatoire) ; et le cas échéant, de l’abattement fixe en faveur des dirigeants de PME prenant leur retraite.
Désormais, pour les transferts de domiciles survenus à compter du 1er janvier 2014 vers un État membre de l’Espace économique européen (hors Liechtenstein), les moins-values réalisées lors de la cession effective de titres soumis à Exit tax sont notamment imputables :
- au titre de l’année de cession et des dix années suivantes, sur les plus-values réalisées lors de la cession de titres soumis à Exit tax pour lesquels une plus-value latente avait été constatée lors du transfert de son domicile hors de France,
- sur les plus-values qui seraient réalisées postérieurement à un retour en France,
- sur les créances représentatives d’un complément de prix, elles sont évaluées à leur valeur réelle lors du transfert du domicile fiscal hors de France.
Source: Article 167 bis du CGI, modifié par décret du 26 mai 2014 (cliquez ici).
Liquidation de l’impôt
- Les plus-values et créances sont soumises au barème progressif de l’impôt sur le revenu, ainsi qu’aux prélèvements sociaux en vigueur lors du transfert du domicile fiscal à l’étranger.
- Le montant de l’Exit tax est égal à la différence entre :
- le montant de l’impôt résultant du barème progressif appliqué à l’ensemble des revenus de sources française et étrangère (y compris les plus-values et créances imposables au titre de l’exit tax)
- et le montant de l’impôt résultant de l’application de ce même barème à l’ensemble des revenus, à l’exclusion de ceux soumis à l’Exit tax.
Sursis de paiement
En pratique, l’exit tax n’est pas acquitté immédiatement lors du transfert du domicile fiscal hors de France, le paiement est différé grâce au mécanisme du sursis de paiement.
Lorsque le contribuable transfère son domicile fiscal dans un État membre de l’Espace économique européen (EEE), hors Liechtenstein (c’est-à-dire Union européenne, Norvège et Islande), le sursis est automatique.
Lorsqu’il transfère son domicile fiscal hors Espace Économique Européen ou au Liechtenstein, le sursis de paiement peut être accordé sur demande expresse.
Pour qu’il lui soit accordé, l’intéressé doit déclarer le montant des plus-values concernées, désigner un représentant fiscal établi en France et, sauf exception, constituer auprès du comptable public compétent, avant son départ, des garanties propres à assurer le recouvrement de la créance au Trésor. Le montant de la garantie à constituer est égal à 30% du montant total des plus-values et créances soumises à l’Exit tax.
Expiration du sursis de paiement
Dans tous les cas, que le sursis soit automatique ou sur option, il prend fin à la survenance de divers évènements, et le paiement devient donc exigible ; notamment en cas de cession à titre onéreux des titres ou de perception du complément de prix, ou en cas de non-respect de ses obligations déclaratives par le contribuable (obligations déclaratives → Cf infra).
Les taux d’imposition applicables sont ceux qui étaient en vigueur à la date du transfert du domicile fiscal hors de France.
Fin de l’Exit tax et dégrèvement de l’impôt
L’impôt établi lors du transfert du domicile hors de France est dégrevé d’office ou restitué (si, en l’absence de sursis, il a été immédiatement acquitté lors du transfert) :
- à la date à laquelle le contribuable transfère à nouveau son domicile fiscal en France,
- pour les plus-values latentes, à l’expiration d’un délai de quinze ans suivant la date de départ (pour les départs survenus jusqu’au 31 décembre 2013, le délai est de huit ans),
- lors de la donation des titres ou de la créance, à condition de démontrer que la donation n’a pas été faite dans un but principalement fiscal (pour obtenir le dégrèvement de l’Exit tax),
- au décès du contribuable, sauf dans les cas prédéfinis où son décès emporte expiration du sursis de paiement.
Obligations déclaratives
Le mécanisme de l’exit tax astreint le contribuable à certaines obligations déclaratives qui se décomposent en deux volets :
- Lorsqu’il transfère son domicile fiscal hors de France, le contribuable doit déposer le formulaire spécial n°2074-ET-D (“Déclaration”) sur lequel il déclare les plus-values latentes, les créances trouvant leur origine dans une clause de complément de prix ainsi que les plus-values en report d’imposition qu’il détient à la date du transfert.
De plus, lorsque le contribuable entend bénéficier du sursis de paiement sur option, il doit déposer ce formulaire, dans les trente jours précédant son départ, accompagné d’une proposition de garantie. - Chaque année, dès lors qu’il bénéficie du sursis, de droit ou sur option, le contribuable devra déposer auprès du Centre des Impôts des non-résidents :
- l’imprimé n°2042 sur lequel sont indiqués les revenus de source française que continue de percevoir l’expatrié
- l’imprimé n°2042 C (« Complémentaire ») sur lequel figurent le montant des plus-values et le montant total de l’impôt en sursis de paiement
- l’imprimé 2074-ET-S (« Suivi ») qui permet d’assurer le suivi de ses impositions
Le défaut de production des déclarations ou l’omission de tout ou partie des renseignements apporte la déchéance du sursis de paiement et donc l’impôt devient immédiatement exigible ; le contribuable aura alors trente jours pour régulariser sa situation suite à une notification de mise en demeure.