Qu’est-ce que la donation graduelle et résiduelle ?

Le

Par Jérôme Delpierre

Comment transmettre son patrimoine ?

Donation graduelle résiduelle

Les donations graduelle et résiduelle sont des types de donation. Ces donations peuvent être considérées comme un acte de prévoyance familiale puisque le donateur organise de son vivant la transmission d’une partie de son patrimoine par anticipation à deux personnes successivement. Elles présentent des avantages quant à la transmission des biens, notamment sur le plan fiscal. Quelles sont les spécificités de la donation graduelle et résiduelle ?

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Définition de ces deux donations

La donation graduelle tout comme la donation résiduelle permet de donner des biens successivement et en deux temps.

Ces deux donations ont en commun le fait de désigner deux bénéficiaires, mais pas plus, car au-delà on parle de donation-partage ou de testament-partage.

Ces donataires peuvent être des membres de la famille du donateur mais pas seulement. La donation peut bénéficier également à un tiers, sans lien de parenté, ou à une personne morale (uniquement en second bénéficiaire) et même, pour second bénéficiaire, des enfants à naître.

Quelles sont les différences entre la donation graduelle et résiduelle ?

Il y a une grande différence entre les deux donations, c’est la manière dont le bien est transmis et se succède.

Concernant la donation graduelle, le premier bénéficiaire peut jouir du bien mais doit le conserver durant toute sa vie et à son décès le transmettre au second bénéficiaire désigné par le donateur.

Le second donataire n’est plus soumis à l’obligation de conservation, c’est-à-dire qu’il peut garder le bien, le vendre, le donner…

Par exemple, le donateur souhaite faire une donation graduelle sur une maison : il désigne ainsi sa fille comme premier donataire puis son petit-fils comme le second.

À son décès, sa fille pourra jouir de la maison mais devra la conserver puisque le bien doit revenir, en cas de décès de celle-ci, au petit-fils du donateur.

En revanche, par donation résiduelle, le premier donataire peut jouir du bien et même le vendre, il n’a pas l’obligation de le conserver. Au décès du premier bénéficiaire, le reste du bien reçu est transmis au second donataire.

Par exemple, le donateur souhaite faire une donation résiduelle concernant ses deux appartements (A et B). Il désigne son fils comme premier donataire et sa petite-fille comme seconde bénéficiaire.

Au décès du donateur, le fils pourra jouir des deux appartements, percevoir des revenus et même les vendre. Si le fils vend l’appartement A, à son décès, la petite-fille n’obtiendra alors de la donation que l’appartement B.

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La donation graduelle et la donation résiduelle

Hormis la différence au niveau du premier donataire, les deux donations suivent le même procédé.

La donation graduelle ainsi que la donation résiduelle organisent la transmission du patrimoine et s’avèrent très utiles si l’on souhaite conserver un bien familial ou bien protéger quelqu’un.

Quels biens sont concernés ?

La donation graduelle et résiduelle porte sur tout type de biens (bien immobilier, portefeuille de valeurs mobilières…), la seule condition est qu’ils doivent être identifiables lors de la donation.

En revanche, il faut savoir qu’en principe ces deux types de donations ne peuvent porter que sur la quotité disponible.

En effet, il n’est pas possible de donner sur la part de réserve du premier bénéficiaire. Car la réserve héréditaire d’un enfant ou conjoint doit être libre de toute charge.

Nombre d’enfantsRéserve héréditaireQuotité disponible
150 %50 %
266,6 %33,3 %
375 %25 %

Par exemple, si le défunt a un enfant, la réserve héréditaire de celui-ci est de 50% de la succession, la quotité disponible est alors de 50%. Si le défunt a deux enfants, la réserve héréditaire de ceux-ci est de 66.6% de la succession, la quotité disponible est alors de 33.3%.

Si le défunt a trois enfants, la réserve héréditaire de ceux-ci est de 75% de la succession, la quotité disponible est alors de 25%.

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Quels sont les effets de la donation graduelle et résiduelle ?

Les donations graduelle et résiduelle ont plusieurs avantages, notamment le fait de conserver un bien dans la famille (maison, œuvre d’art, entreprise).

Par exemple, en faisant une donation graduelle sur un bien immobilier, sauf en cas de perte comme un incendie, il est garanti de rester dans la famille si les deux bénéficiaires sont des descendants.

Il permet également de protéger et avantager un enfant handicapé tout en assurant la transmission des biens à d’autres membres de la famille.

Il est bon de savoir que le second donataire n’est pas considéré comme un héritier du premier bénéficiaire mais qu’il tire ses droits du donateur lui-même.

La donation graduelle ne se rapporte donc pas à la succession du premier et ne réduit pas la réserve héréditaire des héritiers du premier donataire.

A noter que ces deux donations font l’objet d’un acte notarié, le consentement du premier bénéficiaire est indispensable lors de la donation et le nom du second bénéficiaire doit être mentionné mais son acceptation peut se faire après le décès du donateur.

Par ailleurs, le second donataire devient propriétaire du patrimoine (ou du reliquat dans le cas de la donation résiduelle), lorsque le premier bénéficiaire décède. Si le second donataire meurt avant le premier ou s’il renonce à la donation, alors la seconde transmission devient caduque, le bien est conservé par le premier.

Enfin, en cas de disparition du bien comme un incendie ou une vente pour la donation résiduelle, le second bénéficiaire n’a pas le droit de réclamer des dommages et intérêts ou de prétendre au prix de vente du bien.

Cependant, concernant les portefeuilles de titres, qu’il s’agisse d’une donation graduelle ou résiduelle, le premier bénéficiaire peut effectuer des arbitrages (vente et achat de titres), le second donataire aura des droits sur les nouveaux titres.

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Quelle est la fiscalité appliquée à la donation graduelle et résiduelle ?

Les deux bénéficiaires doivent tout de même acquitter des droits de donation mais pas au même moment.

  • Au moment de la première transmission, le premier donataire est redevable de droits de mutation à titre gratuit en fonction de son lien de parenté avec le donateur.
  • Au décès du premier bénéficiaire, le second donataire est également redevable de droits de donation en corrélation avec son degré de parenté avec le donateur initial et non pas avec le premier donataire.

Ces taxations sont calculées après déduction de l’abattement et selon le barème des droits de donation (et non pas de succession) qui sont déterminés en fonction du lien de parenté avec le donateur.

Par exemple, Monsieur X donne un bien à son fils pour le transmettre à son petit-fils. Après le mort de Monsieur X, le fils paie des droits de donation après abattement de la descendance parent/enfant. Puis le petit-fils paiera des droits de donation après abattement grand-parent/petit-enfant.

Sur la transmission consentie entre ascendant et descendant en ligne directe, l’abattement appliqué est de 100 000 €. L’abattement n’est pas limité concernant le degré de parenté aux ascendants. En revanche, pour la descendance, son application est limitée aux enfants du défunt et à leurs représentants, en cas de donation d’un grand-parent à un petit-enfant si le père est décédé par exemple.

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Concernant les donations consenties par les grands-parents à leurs les petits-enfants, l’abattement appliqué est de 31 865 €.

De plus, les droits payés par le premier bénéficiaire lors de la première transmission sont déductibles des droits redevables par le second donataire.

Ci-après le barème applicable sur la part nette après l’abattement correspondant applicable en ligne ascendante ou descendante :

Tranche d’impositionTaux
< 8.072 €5 %
de 8.073 € à 12.109 €10 %
de 12.110 € à 15.932 €15 %
de 15.933 € à 552.324 €20 %
de 552.325 € à 902.838 €30 %
de 902.839 € à 1.805.677 €40 %
> 1.805.677 €45 %

Prenons un exemple simple et concret d’une donation graduelle.

Paul fait une donation d’un bien d’une valeur de 250 000 € à son fils Jean, il précise qu’au décès de Jean ce bien sera transmis à Catherine la fille de Jean.

Au décès de Paul, la taxation de la donation (première transmission) est la suivante :

Part taxable 250 000 €
Abattement applicable (père/fils) 100 000 €
Assiette taxable 150 000 €
Droit de donation selon le barème 28 194 €*

*Détails : (8 072 € x 5 %) + [(12 109 € – 8 072 €) x 10 %] + [(15 932 € – 12 109 €) x 15 %] + [(150 000 € – 15 932 €) x 20 %].

Dans le cadre de la donation graduelle, au décès de Jean, Catherine hérite du bien. Ce dernier a pris de la valeur et vaut désormais 350 000 €, la taxation de la seconde transmission est la suivante :

Part taxable 350 000 €
Abattement applicable (grand-parent/petit-enfant) 31 865 €
Assiette taxable 318 135 €
Droit de donation selon le barème 61 821 €*
Droit dus après déduction des droits payés lors de la 1ère transmission 61 821 € – 28 194 € = 33 627 €

*Détails : (8 072 € x 5 %) + [(12 109 € – 8 072 €) x 10 %] + [(15 932 € – 12 109 €) x 15 %] + [(318 135 € – 15 932 €) x 20 %].

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Le conseil de nos experts

Les donations graduelles ou résiduelles vous permettent de transmettre à deux personnes déterminées un bien en deux temps, dans des conditions fiscales préférentielles. Ce type de donation peut répondre à des situations bien précises, à une volonté particulière dans l’organisation de votre transmission :

  • vous assurer qu’un bien de famille sera conservé sur deux générations,
  • favoriser un enfant dans une situation de handicap sans léser ses frères et sœurs,
  • protéger un enfant malgré lui