La transformation d’une entreprise individuelle en société

Le

Par Lucille Berdery

Tous les points clés pour bien gérer votre entreprise

Transformation entreprise individuelle en societe

L’exercice d’une activité sous la forme individuelle permet de bénéficier d’une grande souplesse (allègement des obligations administratives et comptables).

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Pourtant, une fois que l’activité devient substantielle, de nombreux commerçants ou artisans optent finalement pour l’exercice sous forme sociétaire, et ce pour diverses raisons :

  • La séparation du patrimoine privé et du patrimoine professionnel.

Lorsqu’une société est créée, elle est dotée de la personnalité morale, ce qui permet de distinguer le patrimoine de la société affecté à l’exploitation de l’activité, et le patrimoine des dirigeants qui n’engagent pas ainsi leur responsabilité personnelle. Ainsi, il est recommandé d’exercer son activité sous une forme sociétaire s’il risque d’y avoir des engagements financiers importants, afin d’éviter de mettre en jeu la responsabilité personnelle de l’entrepreneur.

  • Une transmission simplifiée.

La mise en société est aussi un moyen de préparer la transmission de l’entreprise en la facilitant, car les droits sociaux présentent l’avantage de pouvoir être transmis progressivement sans imposer de formalités trop lourdes, au contraire d’une entreprise individuelle qui ne peut être transmise que dans sa totalité. L’exercice d’une activité sous une forme sociétaire n’est pas empêché par le décès du dirigeant, puisque la société continue (à l’opposé de l’entreprise individuelle).

Protéger son patrimoine privé est possible grâce à des techniques différentes. En effet, une innovation récente permet à l’entrepreneur individuel d’opter pour le statut d’EIRL et donc de ne pas créer de société mais d’obtenir quand même une protection eu égard à son patrimoine privé en lui permettant de créer un « patrimoine d’affectation ».

Le choix de protéger son patrimoine sans créer une société dotée de la personnalité morale

Une innovation considérable repose dans la lettre de la loi du 5 mai 2010. En effet, cette dernière a permis à l’entrepreneur individuel de créer un « patrimoine d’affectation » en exerçant son activité sous la forme d’EIRL (entreprise individuelle à responsabilité limitée).

Ce statut présente un certain attrait, d’une part, parce qu’il permet de limiter la responsabilité du chef d’entreprise au patrimoine de l’entreprise et, d’autre part car il offre la possibilité d’opter pour le régime de l’impôt sur les sociétés (option irrévocable).

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La création d’un patrimoine d’affectation permet à l’entrepreneur de déclarer, au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers selon le cas, la liste des biens inventoriés et évalués, qu’il affecte à son activité professionnelle et de distinguer ce patrimoine de son patrimoine personnel sans création d’une personne morale.

Attention cependant, car une faute de gestion pourra engager la responsabilité civile et pénale du chef d’entreprise.

Avantages financiers et fiscaux

1/ Le taux de l’impôt sur les sociétés est souvent plus avantageux que le taux de l’impôt sur le revenu.

2/ En outre, la structure en IS permet d’effectuer des arbitrages entre salaires, dividendes et mise en réserve des résultats.

Plusieurs techniques juridiques peuvent être utilisées pour transformer une entreprise individuelle en société.

Ce résultat est atteint au moyen de la création d’une société, qui en quelque sorte sert d’écran et permet de scinder le patrimoine professionnel du patrimoine personnel, qui est alors protégé. Si l’objectif atteint est le même dans chacun des cas de figure suivants, les conséquences fiscales diffèrent sensiblement selon la forme sociétaire choisie.

La séparation des patrimoines par la création d’une société dotée de la personnalité morale

L’apport du fonds de commerce

Le montage juridique

La mise en société d’une entreprise individuelle suppose la création d’une nouvelle société à laquelle l’entrepreneur individuel apportera son fonds, en tant qu’apport en nature.

L’entrepreneur individuel, en qualité d’apporteur, recevra alors des parts en contrepartie. Le fonds est ainsi apporté à la société dès sa constitution et constitue son objet social.

L’entrepreneur individuel est radié du registre du commerce et la société nouvellement créée est immatriculée.

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La fiscalité

Elle concerne l’impôt sur le revenu. La conséquence principale de l’apport d’un fonds de commerce à une société est la taxation immédiate des bénéfices et des plus-values, étant donné que cet apport est assimilé à la cession de l’entreprise.

Cependant, afin de soutenir les entreprises dans cette démarche, un régime de faveur a été mis en place et en allège sensiblement les conséquences fiscales en les étalant dans le temps. Les personnes faisant apport d’une entreprise individuelle à une société peuvent bénéficier d’un report d’imposition des plus-values.

Ce régime a pour conséquences de permettre d’étaler sur une période de 5 ans (15 ans pour les immeubles) les plus-values dégagées sur les éléments amortissables apportés et de différer la taxation des plus-values constatées sur les éléments non amortissables jusqu’à la cession du bien par la société, ou la cession des droits sociaux à titre onéreux.

De la même manière, report d’imposition des profits réalisés sur l’apport des stocks jusqu’à leur revente (art 151 octies du CGI).

Possibilité d’opter pour une imposition immédiate au taux réduit des plus-values à long terme auquel s’ajoutent les prélèvements sociaux.

Les droits d’enregistrement (art 719 CGI).

Les droits d’enregistrement dans le mois suivant la rédaction de l’acte se voient appliquer les tarifs suivants :

Fraction de la valeur taxableTotal des tarifs applicables
(Somme des droits budgétaires, de la taxe départementale et de la taxe communale)
Moins de 23.000 €0%
(Droit fixe de 15€ applicable aux acquisitions de moins de 23.000€)
Entre 23.000 et 107.000 €3%
Entre 107.000 et 200.000 €3%
Au-delà de 200.000 €5%

Condition : l’acquéreur doit s’engager à maintenir l’exploitation du bien acquis pendant 5 ans minimum.

La mise en location-gérance

Le montage juridique

L’entrepreneur constitue une société avec ses fonds propres. Il va ensuite mettre en location-gérance le fonds au profit de cette société nouvellement constituée.

Juridiquement, c’est la société qui devient alors responsable de l’exploitation du fonds et qui en supporte les risques. Elle paie en contrepartie une redevance au bénéfice de l’ancien entrepreneur.

Ce dernier perd alors sa qualité de commerçant en tant que personne physique mais garde la propriété du fonds et la maîtrise de sa gestion via la société qu’il dirige.

Plus généralement, la mise en location-gérance peut être faite au bénéfice d’une société tierce totalement étrangère au propriétaire du fonds, qui perd alors tout contrôle sur la conduite de l’activité.

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La fiscalité

La mise en location-gérance n’équivaut pas à la cession de l’entreprise, mais à un simple changement du mode d’exploitation.

Par conséquent, les conséquences fiscales sont très différentes de l’apport ou de la cession du fonds car cela n’entraîne pas une imposition immédiate des bénéfices d’exploitation ou des plus-values.

La fiscalité du locataire-gérant

La société locataire doit être commerciale et supporte tous les risques liés à l’exploitation du fonds. Elle est imposée comme un commerçant ordinaire à l’IS. Les redevances versées au bailleur constituent des charges déductibles de ses bénéfices.

La fiscalité du bailleur

Le bailleur est imposé au titre des redevances qu’il perçoit dans la catégorie des BIC non professionnels. Ces redevances sont soumises à la TVA et aux prélèvements sociaux (CSG & CRDS). Juridiquement, le propriétaire du fonds est solidairement responsable des dettes contractées par le locataire-gérant dans le cadre de l’exploitation du fonds pour une durée de 6 mois suivant la publication de la location-gérance.

Fiscalement, le bailleur et le locataire sont solidairement responsables pour les impôts directs dus par le locataire dans le cadre de l’exploitation du fonds, et ce sans limitation de durée dans le temps.

Cette solidarité perdure, même à la fin du contrat de location-gérance, à raison des dettes fiscales afférentes à la période de gérance.